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L’abbatiale se livre encore un peu plus

Tandis que le virus aura raison des festivités inaugurales de l’abbatiale cette année, une revue spécialisée revient sur les récentes fouilles opérées autour et dans le monument payernois. La conservatrice, Anne-Gaëlle Villet, nous en parle.

1. Une voûte mise au jour. L’endroit a dû servir à couler les trois cloches de l’abbatiale datées de 1577 et 1603. 2. De nombreux ossements ont été retrouvés et tous n’étaient pas dans des sarcophages. 3. Il ne faut pas oublier, en parallèle aux fouilles, les travaux de consolidation de l’édifice, avec ici la pose de tirants verticaux au-dessus du bas-côté sud. 4. L’une des sépultures découvertes, en parfait état.Photos dr et rémy gilliand

Propos  Recueillispar Rémy Gilliand

Propos Recueillispar Rémy Gilliand

16 avril 2020 à 02:00

La dernière revue Archéologie Suisse fait la part belle aux récentes fouilles de l’abbatiale. La publication en profite aussi pour un tour d’horizon des recherches bien plus anciennes encore que la dernière campagne de 2015 à 2019. Pour y voir plus clair dans ce dédale, nous avons demandé à la nouvelle conservatrice et directrice du site de l’abbatiale, Anne-Gaëlle Villet de nous éclairer sur les nouveaux trésors du vénérable monument.

− Que ressort-il de ces récentes fouilles?

− Suite à celles-ci, nous avons une vision beaucoup plus claire des étapes et de la chronologie relative de la construction de l’édifice. Nous avons la confirmation que l’abbatiale actuelle a été construite dès le XIe siècle. Quant à l’église plus ancienne, dont les fondations sont encore sous l’abbatiale, son édification remonterait aux VIIIe et IXe siècles. D’autre part, nous avons désormais des indices plus précis sur les murs de la villa romaine construite à cet endroit, mais avant l’église. Cette maison aurait été construite à la fin du IIe ou au IIIe siècle, pas avant. C’est la céramique qu’elle contenait qui nous indique que le chantier n’a pas débuté avant cette période. Marius l’a ensuite fait transformer vers le VIe siècle.

− De très nombreuses tombes ont été découvertes?

− Effectivement, on a recensé près de 1000 tombes. Et les découvertes liées aux rites funéraires de l’époque sont aussi intéressantes. Aucune des sépultures mises au jour sur le site de l’abbatiale n’est antérieure à la première église. Les plus anciennes sont datées par le carbone 14 entre 670 et 680. De nombreuses sépultures sont aménagées par la suite à l’intérieur et à l’extérieur des édifices successifs. De très nombreuses tombes ont été découvertes sur la place du Marché, qui était en fait un cimetière, mais aussi à l’intérieur de l’abbatiale et dans la cour du cloître (cour du Château), le long de son bas-côté sud, car la cour n’a pas été fouillée. Presque toutes les tombes construites en pierre, qu’il s’agisse de sarcophages monolithiques ou de coffrages faits de pierres maçonnées, se trouvent à l’intérieur. Et à cet endroit, les inhumés sont presque exclusivement des hommes, à l’exception d’une femme et d’un enfant.

Ce qui est intéressant aussi, c’est que ces sépultures intérieures révèlent la présence d’une population probablement privilégiée. C’est surtout la taille des squelettes qui montre la grande stature, pour l’époque, des gens reposant ici. On pourrait en déduire que ces personnes devaient être bien nourries et donc en bonne santé. Et les analyses ont aussi mis en évidence une population masculine qui se distinguait par une fréquence élevée de fractures. Peut-être faut-il y voir une relation avec leur quotidien risqué et, pour certains, mortel. De là à imaginer des chevaliers ou des hautes sphères de la société, il n’y a qu’un pas.

− Quant à la vénérable reine Berthe, en sait-on un peu plus?

− Les sources anciennes martèlent qu’elle serait enterrée à Payerne. Lors des fouilles réalisées par François Rodolphe de Dompierre, en 1817-1818, on a pensé avoir retrouvé la tombe de celle qui est considérée comme la fondatrice du couvent de Payerne. Cette légende a bien été entretenue dès le XIXe siècle, mais où est-elle? Car les spécialistes ont quand même des doutes que les ossements retrouvés dans l’abbatiale, puis transférés dans l’église paroissiale, sont bien les siens. Ceci reste encore un mystère.

− Justement, y a-t-il d’autres secrets à découvrir?

− Pour l’instant, il n’y a plus de fouilles prévues. Mais tout n’a pas été exploré, surtout le côté sud de l’abbatiale qui correspond à la cour du Château et au collège actuel. Mais ça, c’est une autre histoire.

− Des histoires que vous nous conterez dès l’ouverture de l’abbatiale?

− Oui, nous sommes impatients, même si la fête inaugurale a été reportée en mai 2021, nous comptons ouvrir l’abbatiale dès que possible. Nous estimons un délai de deux mois dès que les travaux auront repris. Pour l’instant c’est l’inconnue, mais nous avons clairement comme objectif d’accueillir les premiers visiteurs cette année et, si possible, cet été déjà.

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