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Le boguet, signe de liberté? Ça, c’était autrefois!

L’envie nous a pris de replonger dans l’adolescence au guidon d’un bon vieux vélomoteur. Mais le bonheur retrouvé de la vie d’avant fut de courte durée.

Le chemin de mon enfance au bord de la Broye ne m’est plus autorisé avec ce moyen de locomotion. PHOTOS RÉMY GILLIAND

Rémy  Gilliand

Rémy Gilliand

15 septembre 2022 à 02:00

Cet été, tandis que je passais par le Vully, je suis tombé par hasard sur une escouade de touristes à vélomoteur. En les croisant, tandis qu’ils allaient affronter la montée Bellerive à un rythme d’escargot, j’ai pu voir des gens heureux. Leur ébaubissement était contagieux.

En poursuivant mon chemin au volant, je me suis souvenu avoir vu plusieurs reportages dans les journaux et à la télé sur ce retour à cet ancien moyen de locomotion, en Suisse, mais aussi en France avec les Mobylette et autres Solex.

Quelle belle idée de découvrir un coin de pays au guidon d’un vélomoteur! Tout ça me rappelle mon adolescence et cette incroyable sensation de liberté sur mon Maxi Puch. On en a fait des kilomètres, à l’époque avec nos fidèles destriers, à bouffer des moustiques dans notre belle Broye. Des virées incroyables seul ou avec les potes dans des relents d’huile de ricin!

Le casque, première liberté concédée

Comme ma fille possède un tel engin, ni une, ni deux, je décide de m’offrir une escapade sur cette machine sensationnelle. Une révolution dans notre ancienne vie d’ado. J’enfourche l’engin, sans rien lui demander, mais en m’assurant que le réservoir a de quoi supporter mes kilos qui ont un peu évolué en 35 ans… Un peu!

J’ai quand même dû trouver un casque — tiens, déjà une liberté de concédée —, ça n’était pas le cas lorsque j’avais encore plein de boutons sur ma trogne. Deux coups de pédale, le doigt sur le starter, moteur, un coup de gaz et c’est parti. Je me lance et décide de rejoindre le quartier de mon enfance, Vuary. Ces quelques mètres me font retrouver ma vigueur juvénile, si si je vous assure. Du moins jusqu’à la première passerelle de cet ancien quartier agricole. Elle permet de rejoindre la ville «par-derrière», comme on dit. On en a fait des passages sur ce petit pont. Bigre, je vois qu’un panneau interdit l’accès aux boguets… Quel embougné a pu placer ce truc à cet endroit? On passe par où du coup?

Comme je suis un adepte de l’Hymne vaudois et de son amour des lois, je respecte et continue mon périple en me rabattant sur la seconde passerelle, en béton un peu plus bas dans le quartier… Même fichu panneau!

La balade prend des airs de révolte. Je pense à l’ado qui habite à Tombouctou et qui veut se rendre à l’école, ou aux terrains de sport à vélomoteur. Avec ces interdictions, on l’envoie forcément en plein centre-ville, saturé.

Ils n’ont plus notre chance les jeunes décidément. Et le parent que je suis de me poser quand même des questions sur l’utilité de tels interdits. Pour protéger un ou deux piétons qu’on savait éviter et respecter, à l’époque du moins?

Tandis que je peste contre cette véritable privation de nos libertés, un retraité sur son vélo électrique, qui va bien plus vite que ma meule bridée à 33 à l’heure, me passe sous le nez et franchi le modeste pont et sans caque s’il vous plaît… Je suis donc censé arrêter mon moteur et pédaler jusque de l’autre côté et rallumer ma pétoire ensuite!

Je jette un œil à gauche en envisageant poursuivre mon périple au bord de la Broye, sur ce même chemin de notre jeunesse qui nous permettait de rejoindre la plaine agricole. Et là, même fichu écriteau. Bon, je contourne ces tabous par le Bas-de-Vuary, la Bergerie et je franchis un «Bordiers autorisés». Celui-là, c’est uniquement pour les automobilistes. Me voici donc heureux de pouvoir franchir le Rubicon avec mon deux-roues. 300 mètres plus loin le petit chemin de bord de Broye qui mène au pont des Aveugles est, lui, autorisé aux vélomoteurs, alors que le précédent tronçon est prohibé. Allez comprendre… Dans mon détour, j’avais oublié que la route de Grandcour était fermée pour travaux… Dépité je suis!

Je décide d’enfreindre la loi et ne me fie plus à ces satanés signaux d’interdiction. Je me suis rappelé qu’autrefois on avait déjà cet esprit rebelle en maquillant nos boguets, au nez et à la barbe de la maréchaussée. Je ne me suis jamais fait pincer. Au diable les interdits!

A pile ou face?

La suite de mon itinéraire a pris des airs de parcours du combattant. Après un retour par la ville, je guigne où je peux passer pour retourner au bercail. Et tout à coup, un panneau me met du baume au cœur. J’ai le droit d’emprunter la route le long des berges du Carroz-à-Bossy!

Au terme de cette courte balade qui m’a plus dépité qu’enchanté, je me demande quand même si les initiateurs de ces interdictions n’ont pas joué à pile ou face pour placer ces écriteaux de façon si arbitraire.

Quelque temps plus tard, à vélo pédale cette fois-ci, je me suis aperçu que certains chemins de remaniement — vous savez, ces lignées de béton dans les champs — étaient aussi interdits aux boguets. C’est à n’y plus rien comprendre.

J’ai désormais remisé la meule familiale, pensant que dans des jours assez proches ce boguet aura sa place dans un musée, au milieu de tant d’objets qui ont fait le bonheur de notre jeunesse.

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