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Le secret de son métier passion est d’aimer les gens

Depuis quarante ans, le médecin généraliste Ivan Nemitz soigne avec science et bienveillance les Staviacois et les gens de la région. Récit d’un retraité qui ne l’est vraiment pas.

Assis à son bureau, reçu de ses parents il y a 57 ans, face à son jardin où il a vu grandir et jouer ses fils, le docteur Nemitz parle des plaisirs de la vie, de la musique de chambre, de ses origines russes, du bonheur qu’il a d’exercer la médecine et des besoins des patients. Il défend l’écologie et dit «qu’il est temps de passer des mots aux actes.»

Ludmila Glisovic

Ludmila Glisovic

18 juin 2020 à 02:00

Je compte continuer à travailler jusqu’à 80 ans», déclare le docteur Ivan Nemitz. Une décision dont il ne fait pas mystère. Le médecin, né à Genève en décembre 1947, a affiché cette décision noir sur blanc sur les murs de sa salle d’attente. Un lieu de passage qui accueille à certaines heures les malades sans rendez-vous. «Je suis le seul à encore le faire», regrette-t-il.

«Je suis très organisé et je traite les dossiers de mes patients tout de suite.» Il a d’ailleurs préparé avec soin l’entrevue. Le praticien a obtenu son diplôme fédéral de médecin en 1974. Pendant cinq ans, il s’est formé en médecine générale tant à Genève qu’à Lausanne en faisant des stages notamment en psychiatrie, médecine interne, gynécologie obstétrique, etc. En 1979, il présente sa thèse de doctorat. Et, en 1980, il répond à une annonce qui propose de reprendre un cabinet médical «dans une petite ville de Suisse romande au bord du lac de Neuchâtel». Ainsi, le 2 juin 1980, il ouvrait son cabinet à Estavayer-le-Lac. Quarante ans et 130 000 consultations plus tard, il y reçoit toujours ses patients. «Je voulais organiser une fête, mais à cause du Covid, elle est reportée à 2021», regrette celui qui se souvient du nom de sa toute première patiente, «Aimée», comme une prémonition.

Des contacts et de la recherche
Sa biographie ne s’arrête pas là. Tant s’en faut. Outre ses nombreuses publications, engagé, ce lauréat du Prix Claude Perrier pour ses travaux sur les rôles des médicaments dans notre système de santé a été très actif dans de nombreuses associations, commissions, etc. «Cela permet d’avoir une vision globale. Tenir un cabinet médical n’est qu’une partie de la fonction d’un médecin, note-t-il. On est en contact avec toutes les couches de la société. L’aspect relationnel et psychosocial de la médecine générale est essentiel.»

Le docteur Nemitz aime son métier et suit avec bonheur les évolutions survenues ces dernières décennies, dont nous bénéficions tous. «Les services d’urgence se sont beaucoup améliorés; avec l’imagerie médicale, on est passé de l’ultrason au scanner, puis à l’IRM; la chirurgie, les soins à domicile se sont aussi développés…»

La mort et le don
Côté vie privée, il s’est marié en 1974, avec Michèle. De cette première union sont nés Gregor en 1979 et Maxime en 1982. En 2002, il divorce. En 2005, un drame frappe la famille. A 23 ans, Maxime décède d’une maladie génétique.

«C’était un basketteur, une force de la nature. Une thrombose veineuse étendue dans le cerveau le plonge dans le coma. J’ai toujours été convaincu par le don d’organe. Mais nous ne connaissions pas sa position. Puis, nous avons trouvé dans son portefeuille sa carte de donneur signée en 2001. Son cœur solide, ses reins, son foie, etc., ont permis de prolonger les existences de personnes en grande détresse. C’est un signe de vie.»

Gregor a fait des études en sciences politiques aux Etats-Unis. Il s’y est marié. Puis, il a repris des études en urbanisme à New York et Montréal. «Aujourd’hui, ils sont rentrés en Suisse. Ils ont une fille de 5 ans, Rose», ajoute l’heureux grand-père.

Si la médecine est sa passion, il ne la laisse pas le dévorer. «C’est un métier avec de la charge émotionnelle, il faut pouvoir se ressourcer. On est un peu un oiseau de malheur. Il faut trouver les mots justes quand on annonce quelque chose qui fait basculer l’existence du patient. C’est important d’être bien accompagné.» Ainsi, en 2008, le docteur s’est remarié avec Huguette Baumann. «Mon épouse est essentielle.»

Une autre personne tient une place importante, c’est Marlise Singy. «Nous sommes voisins et elle est ma secrétaire depuis le début», souligne-t-il, reconnaissant et épaté de cette longévité.

La vie, un émerveillement
A ses débuts, lorsqu’il perdait un patient, il arrivait au jeune médecin de pleurer. «Ce métier est une bonne représentation de ce qu’est la vie», déclare-t-il en se rappelant aussi son passage en obstétrique. On ne s’étonne pas que cet humaniste ne soit pas pour l’acharnement thérapeutique. «Voir une cohérence dans la vie demande un long travail intérieur. L’existence est un mystère à accepter avec émerveillement», racontet-il comme une évidence. «La capacité de régénération du corps est extraordinaire», s’enthousiasme encore Ivan Nemitz. «Alors vouloir aller sur Mars… c’est juste de l’orgueil!»

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