Logo

Actualité

Les honneurs ne seront pas rendussans se serrer la main

Alors que les commerçants lucensois, actifs au sein du groupement GCAILE, ont décidé récemment la dissolution de leur groupement, il nous semble opportun de rappeler dans quel esprit il avait été créé, en 1980.

Bernard Chanez, à l’origine des Comptoirs de Lucens, ici avec son épouse Brigitte, lors de l’édition 1999.Photo JDF

Jean-Daniel  Fattebert

Jean-Daniel Fattebert

12 janvier 2023 à 01:00

Temps de lecture : 1 min

Dans l’édition de La Broye Hebdo du 22 décembre, une brève informait les lecteurs que «faute de nouvelles personnes prêtes à s’impliquer, les membres du GCAILE (Groupement des commerçants, artisans et indépendants de Lucens et environs) ont décidé de dissoudre le groupement».

Un peu court en bouche, jugent certains initiateurs du mouvement. La lassitude affichée par celles et ceux qui tiennent le groupement à bout de bras depuis quelques années est certes compréhensible. Même si depuis les origines de l’organisation, la population de Lucens a doublé, deux fois plus de clients qui commandent en ligne, ça ne fait pas deux fois plus de clients dans les commerces de la bourgade.

Une réalité qui cohabite avec les souvenirs liés aux multiples animations organisées par le GCAILE, constitué officiellement le 2 septembre 1980. A l’instigation de Bernard Chanez, qui faisait commerce de quincaillerie sur la place de la Belle-Maison, ceux qu’on nommait familièrement les «Boutiquiers de la Cerjaulaz» (en référence au ruisseau qui borde la bien nommée rue du Marché), décident de réactiver la formule des marchés d’antan.

Persuadés qu’ensemble on est plus fort, ils entraînent d’autres commerçants et artisans dans leur mouvement et, sans perdre de temps, les 14 et 15 novembre ils sont vingt-quatre à monter leur première exposition, à la grande salle.

Ça marche, on recommence

Face au succès populaire et commercial rencontré, il est décidé de récidiver l’année suivante, avec un marché-exposition qui réunit alors 33 exposants. Ils seront 37 en 1982. Le marché-exposition devient comptoir en 1986 et s’étale alors sur trois jours, pour toujours mieux accueillir les visiteurs.

Le nombre d’exposants augmente, le comité se structure. Suivant la voie tracée par Bernard Chanez, Frédéric Rossier, Bernard Bärtschi puis Jean-Paul Rochat en assument tour à tour la présidence avec enthousiasme, clairvoyance et détermination.

Marchés, quinzaines commerciales et comptoirs sont organisés chaque année, le comité et les commerçants rivalisant d’audace et de créativité pour animer la vie lucensoise. Avec des hôtes d’honneur remarquablement complices des événements, comme la ville d’Estavayer, le Pays-d’Enhaut ou l’Association vaudoise du tourisme pédestre.

N’oublions pas d’ajouter que la population prenait plaisir à se laisser séduire, par les actions commerciales organisées périodiquement.

Les 22, 23 et 24 octobre 1999, pour marquer le vingtième anniversaire du comptoir, les stands sont décorés à l’image de capitales européennes. De Paris à Venise, de Londres à Grenade, les exposants portent la manifestation à son apogée. Ce fut l’une des plus brillantes éditions de ce qu’on pourrait nommer «les vingt glorieuses», avant une époque plus compliquée sur le plan des affaires, pour celles et ceux qui ensuite ont repris le flambeau.

Le temps du Comptoir de Lucens est passé, c’est ainsi. Il aurait été ingrat de ne pas serrer symboliquement la main de ceux qui l’ont mené, deux décennies durant, sur le chemin du succès: les commerçants et artisans lucensois bien sûr et ceux qui, à l’époque, ont pris la responsabilité de les fédérer et les diriger.

La commerçante

Sur l’initiative de la presse locale, le Comptoir de Lucens s’offrit même le luxe d’avoir son quotidien, livrant chaque matin les nouvelles récoltées dans la nuit… Dans l’édition du 7 novembre 1987, le chroniqueur de L’Echo des Boutiques parlait avec tendresse de la commerçante d’alors:

Il y a un point commun à tous les commerçants, ils ont trouvé jolie compagne. Il doit y avoir dans leur acharnement au boulot, dans leur «image de marque», comme disent les spécialistes, quelque chose de rassurant et d’envoûtant, qui ne laisse pas indifférentes les jeunes filles à marier. Très vite au contact de l’échoppe et de celui qui la tient, la nouvelle commerçante apprend à se lever tôt, à se coucher tard, à ouvrir, à courir, à sourire, oubliant l’heure, ses douleurs, tout à son bonheur.

«Faut-il pleurer, faut-il en rire?» s’interrogeait le poète. On ne voit pas le temps passer. Un soir de lassitude où la commerçante a bien rempli son contrat (horaire égal = travail égal), elle s’accorde un instant de répit, assise sur le coin du comptoir et se demande, simplement, «pourquoi?».

De l’étage, les voix des enfants apportent une réponse à ses interrogations. Ils réclament son aide pour les «leçons». Et si plus tard l’un d’eux reprenait la boutique. Il se lèverait tôt, se coucherait tard, développerait l’affaire. Un vrai commerçant, quoi, qui ferait alors le plus beau des métiers. JDF

Ce contenu provient de notre ancien site web. Il est possible que sa mise en page ne soit pas idéale. En savoir plus