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Serres chauffées pas si utiles

L’Union maraîchère suisse a élaboré sa stratégie pour respecter l’objectif national de zéro émission nette de gaz à effet de serre. Rencontre avec deux maraîchers dans le Vully, sereins quant à leur avenir.

Les serres devront être chauffées d’ici à 2040 sans combustibles fossiles.Photo Jean-michel zuccoli

Jean-Michel  Zuccoli

Jean-Michel Zuccoli

2 février 2023 à 01:00

D’ici à 2030 les serres devront être chauffées à 80% sans combustibles fossiles, et d’ici à 2040 à 100%. Afin de satisfaire l’objectif national de zéro émission nette de gaz à effet de serre d’ici à 2050, l’Union maraîchère suisse (UMS) a élaboré ainsi sa stratégie, communique l’Agence d’information agricole romande (AGIR). L’utilisation de chaudières à pellets ou à d’autres matériaux, ou encore la récupération de la chaleur dissipée par des installations industrielles figurent parmi les solutions alternatives envisagées par Matija Nuic, directeur de la faîtière.

Dans le Vully vaudois, l’inquiétude n’est pas de mise chez les maraîchers. «Nous n’avons pas de culture sous serre chauffée», note Sylvie Gentizon de Constantine. Avec son mari Yannick, elle travaille 1,5 ha de cultures maraîchères. Asperges vertes, rhubarbe, salades, tomates, poivrons, concombres, haricots, courges, doucette et radis poussent sur leurs terres selon la saison. «Certains légumes croissent effectivement sous serres, mais elles sont non chauffées», précise-t-elle. «Nous n’avons pas opté pour des serres chauffées pour des raisons de coûts et par envie de travailler avec les saisons», ajoute la responsable des Jardins de Constantine.

Selon la productrice de fruits et légumes, il n’y aurait pas de maraîcher ayant recours aux serres chauffées dans le Vully vaudois.

Changer de cultures

A quelques kilomètres de Constantine, l’exploitation des frères Léandre et Maxime Guillod à Môtier ne sera également pas beaucoup impactée par l’objectif national zéro émission nette de gaz à effet de serre. «On a changé de cultures depuis plusieurs années déjà. Nous avons opté pour des serres froides, sans chauffage», précise Léandre Guillod. Troisième génération d’une famille de maraîchers, ils ont en effet senti au début des années 2000 que la pression sur les prix et les charges allait encore augmenter. Que faire? Abandonner les cultures énergivores comme les tomates et les concombres. «Nous nous sommes spécialisés dans la production de doucette», explique-t-il.

Un projet de serres froides pour une surface de 13 400 m2 voit donc le jour en 2005 près de La Sauge, sans chauffage. «Ainsi, d’un point de vue économique, nous avons drastiquement réduit la consommation de mazout», explique Léandre Guillod. Seules les serres situées à Môtier, d’une surface de 3000 m2, sont dotées d’un système de chauffage. «Nous chauffons encore pour que la neige fonde sur les vitres afin qu’elles ne se brisent pas sous le poids de l’or blanc. Avec le chauffage, nous évitons aussi que l’eau ne gèle dans les tuyaux distribuant la chaleur. Nous maintenons ces cultures hors gel», précise le patron de Guillod SA. De 60 000 litres de mazout par année, seuls 5% sont encore nécessaires aujourd’hui. «Grâce à l’économie, on fait de l’écologie», fait-il remarquer.

Se poser les bonnes questions

En ce qui concerne l’avenir, le maraîcher ne se fait pas de souci. «On ne connaît pas le climat qui régnera dans le Vully d’ici 10 ans. Il neige de moins en moins, peut-être qu’il ne gèlera plus chaque année et nous n’aurons plus besoin de chauffer», informe-t-il, soulignant que changer de culture sera peut-être de toute façon nécessaire. Si un chauffage reste nécessaire, une chaudière à bois pourrait être envisagée, mais les coûts d’investissement seraient un frein vu la petite surface des serres. L’installation de bougies ou faire un feu seraient également des solutions de secours. «Mais le bois restera-t-il véritablement une énergie renouvelable si tous les maraîchers et l’industrie se mettent à l’utiliser?» se questionne-t-il.

S’il reconnaît que les mesures incitatives sont favorables pour le climat, il estime qu’il y a d’autres mesures efficaces qui pourraient être prises de suite: à quand l’interdiction de vente de tomates entre novembre et mai? «Changer notre mode de consommation est probablement le moyen le plus efficace de réduire les émissions de CO2», analyse-t-il.

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