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Un bras de fer interminable

En réponse à une pétition, le Conseil d’Etat vaudois confirme sa volonté de démanteler les chalets dans la réserve. Mais les propriétaires, soutenus par leur association, entament des procédures judiciaires.

L’Association des riverains de la rive sud du lac de Neuchâtel ne relâche pas la garde concernant l’avenir des chalets de la Grande Cariçaie (ici à Cudrefin), menacés de démantèlement.Photo Pierre Köstinger

Pierre  Köstinger

Pierre Köstinger

10 décembre 2020 à 01:00

Les opposants à la démolition des chalets de la Grande Cariçaie, décidée par les cantons de Vaud et Fribourg, ne relâchent pas la pression. Vendredi dernier, par le biais d’un communiqué, l’Association des riverains de la rive sud du lac de Neuchâtel (ARSUD) dénonce une procédure de démantèlement qu’elle juge «illégale» et appelle le Gouvernement vaudois à proposer «une solution négociée» pour la préservation des 70 chalets dans la réserve vaudoise (contre 117 côté Fribourg).

Cette réaction fait suite à la réponse, le 18 novembre dernier, du Conseil d’Etat concernant la pétition d’Arsud, que le Grand Conseil vaudois avait renvoyé de justesse au gouvernement par 63 voix contre 62 et une abstention. Réponse dans laquelle l’exécutif cantonal confirme sa volonté de suivre la loi fédérale sur la protection de la nature (LPN) en poursuivant la procédure de résiliation des baux commencée en 2017. Le «cadre légal strict», écrit-il, «ne permet pas une régularisation des chalets».

Dans la foulée, le député Philippe Cornamusaz (PLR), de Trey, a déposé début décembre une interpellation pour soutenir les propriétaires de ces chalets construits de Cudrefin à Yvonand entre 1920 et 1962, soit avant la création de la réserve. Dans son texte, l’élu en appelle à trouver une solution «gagnant-gagnant» entre le canton et les propriétaires, au lieu de persévérer à s’embourber dans des luttes qui durent déjà depuis des années.

«Respecter le droit»

Arsud déroule des arguments juridiques. La Commission fédérale pour la protection de la nature et du paysage (CFNP), insiste l’association, «n’est qu’un organe strictement consultatif qui n’a aucune force de loi». Elle souligne aussi que la LPN n’exige pas à proprement parler le démantèlement des chalets. De plus, la construction de ces résidences d’été étant antérieure à la création de la réserve, Arsud considère que les propriétaires bénéficient de droits acquis, en vertu de l’article 80 de la loi cantonale sur l’aménagement du territoire et les constructions. «Nous respectons le droit et nous attendons de l’Etat qu’il le fasse aussi», résume Benoît Dumas, secrétaire général d’Arsud, rappelant que les Parlements vaudois et fribourgeois se sont prononcés en faveur des chalets à plusieurs reprises.

Par «solution négociée», Benoît Dumas entend une proposition dans l’esprit des contrats nature, par lesquelles les propriétaires des chalets pouvaient rester dans la réserve sous certaines conditions au bénéfice de l’environnement. Adoptés par les cantons de Vaud et Fribourg en 2007, les contrats nature seront finalement annulés par le Tribunal cantonal fribourgeois en 2009, puis le Tribunal cantonal vaudois l’année suivante. «La situation est différente aujourd’hui, mais nous sommes convaincus qu’il y a un potentiel pour le tourisme doux et local avec ces chalets», souligne le secrétaire général d’Arsud.

Pour la Direction générale de l’environnement (DGE), le maintien des chalets dans la réserve est tout simplement incompatible avec les objectifs de protection de la nature et du paysage. «Plus que l’avis de la commission fédérale, c’est sur les bases légales rappelées par cette dernière que se base le canton pour conclure à l’impossibilité de légaliser les chalets», souligne Denis Rychner, conseiller en communication pour la DGE.

Rappelant que «les démarches de démantèlement sont tout à fait légales compte tenu du cadre en vigueur», il précise au sujet du droit acquis que l’Etat de Vaud «loue des portions d’une parcelle de base non construite sur laquelle des constructions mobilières, n’ayant pas de caractère permanent, peuvent être érigées durant la location.»

Entre le canton et Arsud, le dialogue s’enlise donc dans le marécage du droit. Une tentative de conciliation à Vully-les-Lacs a échoué. Les locataires ont saisi le Tribunal des baux. A Cudrefin, où se trouvent 47 chalets, «des courriers de résiliation suivront en 2021», signale Denis Rychner. Une situation que déplore le syndic de Cudrefin Thierry Schneiter, même s’il ne défend pas activement les riverains. «Ce sont des touristes respectueux de la nature. Ils font aussi vivre les commerces locaux et limitent l’érosion des berges», observe-t-il.

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