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Egratigneur

L’Egratigneur


Par Rémy Gilliand

Par Rémy Gilliand

18 avril 2019 à 02:00

A force de répéter à sa fille qu’elle doit crocher à l’école pour l’allemand, ce papa a des scrupules. Il se souvient de ces années passées au fond de la classe, près de la fenêtre à regarder les petits oiseaux plutôt que d’écouter 
sa prof d’allemand, Anita, s’évertuer à faire rentrer la langue de nos voisins dans les cerveaux ramollis de cette équipe de bras cassés. Jamais ils n’auront besoin de ce langage tellement hors du temps pour eux, pensaient-ils. Un bon tiers de siècle plus tard, ils remarquent que pour commander l’incontournable «Schnizel-paniert, ein bier», cela leur a suffi. Mais c’était sans compter sur ce jour où le brave papa s’en va à Berne, en savoir plus sur les avions de combat… Comme s’il n’en avait pas plein les esgourdes dans sa Broye natale.

Il arrive dans le gouffre de la salle de presse du Palais fédéral. Il sent le piège se refermer. Il y va de son «Bonjour» à la welche, comme pour marquer le territoire. Tandis qu’on lui répond gentiment en allemand, enfin plutôt en dialecte. Les interlocuteurs s’installent et par bonheur, il rencontre un collègue qu’il connaît et qui parle comme lui. A la question de savoir si cette présentation sera dans les deux langues, il lui répond qu’ici, c’est bien souvent tout en teuton… Et il ne va pas être déçu, plus d’une heure durant, il a droit à un florilège de borborygmes barbares et techniques qui lui échappent. Aussi poétique que le bruit s’échappant des réacteurs des Hornet. A l’heure des questions, il estime que personne n’a posé celle qui lui brûle les lèvres. Il se lance, pose le doigt sur le bouton du micro, faisant honneur à Molière dans cette Berne fédérale. Mais c’est bel et bien dans la langue de Goethe que la réponse a fusé!

«Ich habe einen vollen Kopf. Ich gehe zurük zur Broye!»… «Danke Google translate!»

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