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Egratigneur

L’Egratigneur


Par Jean-Daniel Fattebert

Par Jean-Daniel Fattebert

12 septembre 2019 à 02:00

Préparer le menu de Bénichon familial sans qu’elle y mette sa patte, on oublie.

Malgré les outrages du temps et les rides qui donnent à ses joues une friande touche de poire à botzi caramélisée, elle a tenu bon. C’est elle qui avait payé les choux, elle était en droit d’exiger qu’on les accompagne d’un authentique jambon à l’os, cuit maison.

La perspective n’enchantait guère sa fille, d’humeur contrariée à l’idée d’occuper des heures durant la grande marmite et une plaque de la cuisinière, alors qu’on pouvait à notre époque acheter du jambon à l’os cuit et même déjà tranché. Il suffisait de le réchauffer sur les choux dans les dernières minutes de cuisson, pour le servir chaud et fondant à souhait.

«Alors là… jamais. Si Raymond était encore là, il dirait comme moi: chez nous, pour la Bénichon on a toujours cuit le jambon à l’os entier, ça n’est pas aujourd’hui que ça va changer.» Si les compromis peuvent faire recette en politique, l’aïeule avait démontré qu’en cuisine familiale, c’était nettement plus compliqué.

Restait la ruse. Il fallait y penser, la fille a commandé au boucher une flopée d’épaisses tranches de jambon à la borne déjà cuit et… un manche de la même veine, bien en chair.

Le jour J, depuis le coin de la cuisine, installée dans son fauteuil qu’elle ne quitte pratiquement plus, l’ancêtre a pu percevoir, rassurée d’avoir eu le dernier mot, le manche du jambon à l’os qui dépassait de la marmite.

Ça se passe comme ça en terre broyarde! Et ne me dites pas que la véracité de l’anecdote branle au manche. Elle date d’à peine une semaine et, sous la torture, je pourrais livrer le nom du témoin qui me l’a révélée. Vivement le Recrotzon!

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