L’Egratigneur

Confinez, confinez, il en restera toujours quelque chose…

— Pour changer, si on ressortait le Monopoly?

— Tu penses que ça va si mal que ça?

— Non, mais comme on ne peut plus faire les boutiques, ça serait une façon de s’acheter encore des trucs.

— Je veux bien, si tu ne précipites pas sur Lausanne et Zurich, comme la dernière fois.

— La dernière fois… Quelle mémoire, il y a bien dix ans.

— J’ai la mémoire des défaites, même honorables.

— Honorables, j’espère que tu plaisantes. Tu avais dispersé ta cagnotte dans toutes les directions, sans pouvoir bâtir nulle part.

— Gagnante vaniteuse!

— Perdant amnésique!

— Allez, joue!

— Trois… Schaffhouse. De la roupie de sansonnet, je te le laisse.

— Un mépris de l’adversaire qui ne me surprend pas. Six, Aarau, j’achète.

— Quatre, Chance: «Doit payer à titre d’écolage, 3000 francs»

— T’attends quoi, paie!

— Ça va? Payer un écolage, alors que toutes les écoles sont fermées. Tu suis l’actualité, parfois? Tu peux me dire ce qu’ils en feraient, de mes frais d’écolage, par les temps qui courent?

— Non mais… On joue justement pour échapper à l’actualité et toi tu la remets dans le jeu, juste parce que ça t’arrange. C’est de la triche.

— Non, je m’adapte. Et tu peux voir que sans tricher, j’ai acheté Lausanne au premier passage et que je viens de tomber sur Zurich… Tu connais le tarif, avec un hôtel le péage est à 40 000 francs. Ça me donne soif, je vais chercher à boire, tu veux quelque chose, un verre d’eau?

— Non, je sens que tu pourrais me le faire payer!