L’Egratigneur

J’ai bien aimé mon repas d’anniversaire, pour mes sept ans, chez mes grands-parents. D’abord parce que ma grand-maman, elle n’est pas comme celle de mon copain Loïc. Elle ne fait jamais de choux-fleurs quand je mange chez elle. Mais c’est surtout le Bronx, parmi les adultes, qui m’a plu. Entre le certificat Covid et le trou de Tolochenaz, ça a chauffé.

L’oncle Bruno, qui «est pour tout ce qui est contre et contre tout ce qui est pour», comme dit mon papa, il a passé un de ces savons aux CFF! Maman lui a dit qu’avec son gros 4x4 pour aller de Middes à Berne, il n’était pas concerné par les perturbations à la gare de Morges, ça n’a servi à rien. Il était solidaire, comme il dit, et tante Corinne a ajouté que la solidarité, c’est ce qui manque le plus dans notre société.

Maman a répondu qu’entre solitaire et solidaire, il n’y avait qu’une lettre pour la différence. Grand-père, toujours prêt à remettre la briquette, comme dit grand-mère, a déclaré que les trous sont depuis la nuit des temps de toutes les catastrophes. «En 86, quand la chimie bâloise avait gravement pollué le Rhin, un écolo s’était fait remarquer en affirmant que ça sentait l’eau de Bâle dans tous les trous de Cologne», qu’il a dit. Les adultes ont bien ri, j’sais pas pourquoi.

Au dessert, personne ne s’était calmé, autour de la table. Quand j’ai éteint les bougies de mon gâteau d’anniversaire, oncle Bruno m’a dit de bien en profiter. L’année prochaine, à l’en croire, le Conseil fédéral imposera le port du masque pour souffler les bougies.

Maman a même pleuré un coup, quand il m’a demandé ce que j’aimerais faire plus tard, pour bien gagner ma vie et que j’ai répondu «sonneur de cloches»…