L’Egratigneur

Après les robots de divertissement des EMS, voici qu’arrivent les robots de service dans les troquets de nos contrées, jusque-là plutôt épargnés par les giboulées de l’intelligence artificielle.

A ce qu’il paraît, ceux de la dernière génération ont même un écran destiné à afficher le menu du jour ou – pourquoi pas? – un large sourire.

Réservés jusque-là au service, ils ne perdent rien pour attendre. C’est quand leurs inventeurs imagineront les hisser à la tête de l’établissement qu’ils regretteront le joli temps d’avant. Celui où ils n’étaient pas encore conçus.

Ils verront que patron de bistrot, ça n’a rien d’artificiel!

S’il paraît préoccupé, les clients de la table ronde disent qu’il n’est pas commerçant. Si au contraire il est de bonne humeur, c’est qu’il a le sourire commercial.

La cliente près de laquelle il ne s’arrête pas pour bavarder le jugera plus hautain qu’un volet de cure. S’il s’assied cinq minutes pour quêter des nouvelles de sa santé, il servira d’alibi pour le retard du dîner: «Celui-là, quand il commence, on ne peut plus s’en débarrasser. J’ai dû lui raconter toute mon opération.»

S’il est toujours derrière son comptoir, c’est que seul le tiroir-caisse l’intéresse. Mais qu’il s’échappe un jour pour une petite visite à ses fournisseurs, tombe alors la sanction: «Forcément, il n’est jamais là!»

Et ça n’est pas différent si le patron de bistrot est une patronne.

Robots en phase de montage, puisque vous en avez désormais la capacité, réfléchissez! L’intelligence artificielle qu’on vous promet n’est peut-être que le sommet de l’iceberg d’une bêtise naturelle coriace. Nullement menacée, malheureusement, par le réchauffement climatique.