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Décor royal et classe à l’italienne

Légende vivante de la Fiorentina et de l’équipe d’Italie, championne du monde en 1982, Giancarlo Antognoni était l’illustre invité de l’Association culturelle italienne de la Broye samedi dernier au château de Lucens, aux côtés d’autres figures bien connues du ballon rond.

Les acteurs de la table ronde à Lucens avec, de gauche à droite: Pino Varquez (ancien portier du LS), Joël Robert (RTS), Philippe Hertig (ancien joueur du LS), Giuseppe Vallone (président de l’ACIB), Giancarlo Antognoni (champion du monde avec l’Italie en 1982) et Erich Burgener (ancien gardien emblématique de l’équipe de Suisse).Photo alain schafer

Alain  Schafer

Alain Schafer

10 novembre 2022 à 01:00

Le château de Lucens, un décor royal, à la hauteur du plateau prestigieux d’invités présents samedi dernier dans la Broye pour évoquer le sacre de l’Italie à la Coupe du monde de football en 1982, survenu dans un contexte trouble. «Une période marquée par le Totonero (scandale des matches truqués), les Brigades rouges et une situation sociale difficile. Ce titre a transformé la vie des Italiens. Il a rendu fierté et dignité à toute une génération, notamment aux expatriés qui menaient une vie dure. On n’était plus le pays du catenaccio ou de la mafia, mais les champions du monde», a contextualisé Guiseppe Vallone, le très actif président de l’ACIB (Association culturelle italienne de la Broye), à l’origine de cette table ronde animée par le Broyard de la RTS Joël Robert, dans une salle comble où flottait un parfum de nostalgie.

La classe sur et hors du terrain

Qui mieux que Giancarlo Antognoni pour en parler, lui qui a été le maître à jouer de la Squadra azzurra lors de cette épopée espagnole conclue par une victoire en finale face à l’Allemagne de l’Ouest? Costume impeccable, chevelure toujours bien fournie, voix calme et posée, le Florentin de 68 ans n’a rien perdu de sa classe ni de son élégance, celles qui ont fait sa légende sur et en dehors du terrain.

A ses côtés, ses anciens coéquipiers du Lausanne-Sport Erich Burgener, portier emblématique de l’équipe de Suisse, Pino Varquez et Philippe Hertig, autre international helvétique. Les mêmes qui avaient cru à un canular lorsque le stratège débarquait en terre vaudoise en 1987, après 15 saisons passées à la Fiorentina. «Le jour de son arrivée, je me suis précipité au stade pour vérifier que c’était bien lui», sourit «Bubu» son voisin de palier. «Nos épouses ont sympathisé, si bien qu’elles allaient faire les boutiques ensemble à Milan. Sur le terrain, il savait tout faire, avec un jeu à une touche de balle, il bonifiait toute une équipe, un joueur exceptionnel qui ne trichait jamais sur un terrain. De nos jours, il y a beaucoup de cinéma.»

Face à tant d’éloges, le Transalpin est resté stoïque. Il a apprécié son passage en Suisse. «A 33 ans, je voulais finir ma carrière dans un contexte moins stressant et je ne me voyais pas jouer dans un autre club que la Fiorentina en Italie. Cette opportunité s’est présentée et je l’ai saisie. Mon expérience à Lausanne a été très positive», assure l’Italien. Alors jeune capitaine du LS, Philippe Hertig s’en souvient parfaitement. «Entrer sur le terrain avec derrière soi un champion du monde, un joueur d’une telle expérience qui m’avait inspiré étant gamin, a été un sentiment incroyable. Il était rare d’avoir un joueur de ce calibre dans le championnat suisse il y a 35 ans, cela nous gonflait d’orgueil. Jouer avec lui était simple, il suffisait de partir en profondeur et le ballon arrivait avec certitude dans les pieds.»

Au-delà de ses aptitudes de jeu exceptionnelles, ce sont surtout ses qualités humaines qui auront fait l’unanimité durant sa carrière. «La seule fois où le public de la Fiorentina a applaudi un but de l’équipe adverse, c’était lors d’un match amical face au LS, Giancarlo avait marqué», a lancé un participant averti à travers la pièce. Cette ferveur et ce respect, Giancarlo Antognini les ressent encore 40 ans après le triomphe de Madrid. «Les gens m’en parlent encore souvent aujourd’hui. Cette victoire a changé l’Italie, socialement, politiquement et économiquement.»

Devenu entraîneur puis dirigeant de la Fiorentina jusqu’à récemment, Giancarlo Antognini a un regard contrasté sur le football moderne, éloigné de ses origines terriennes. «Le rapport entre les tifosis et les joueurs a changé. Le contact humain a disparu, comme certaines valeurs. J’ai toujours essayé d’avoir un comportement exemplaire durant ma carrière. Etre resté fidèle à mon club est ma plus grande fierté et l’amour du public mon plus beau cadeau. Je reste un peu nostalgique de ce football des années 1980, même si je reste un passionné, le foot est toujours beau à regarder.» Un avis partagé par Erich Burgener. «Impossible de comparer les époques, mais les joueurs étaient évidemment plus accessibles, ils vivaient au milieu du peuple, les journalistes venaient les interviewer dans les vestiaires. Tout est devenu plus compliqué», glisse le Valaisan, qui n’en perd pas moins son enthousiasme. «Il faut vivre le foot, le reste on s’en fout!»

Avant de prendre congé, Giancarlo Antognini a même osé un petit pronostic pour le Mondial au Qatar, en l’absence regrettée de son Italie. «Le Brésil est mon favori, mais la Suisse a des arguments, je la vois en outsider.»

Pari réussi pour l’ACIB

Pari réussi pour l’ACIB et Giuseppe Vallone, pas peu fier d’avoir su attirer à Lucens son illustre compatriote. «Nous aurions pu faire cette table ronde à Lausanne et attirer ainsi deux fois plus de monde, mais organiser cet événement dans la Broye me tenait particulièrement à cœur», confie-t-il. La soirée s’est poursuivie à la grande salle de Lucens où Giancarlo Antognini a reçu le prix du mérite de l’ACIB pour l’ensemble de sa carrière sur la scène. En échange, le Payernois a reçu un maillot de la Fiorentina. La grande classe quoi!

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