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La résurrection de Pascal Mancini

Auteur de la meilleure saison de sa carrière, le sprinter broyard va disputer, à 33 ans, les championnats d’Europe sur 100 m à Munich. Sensationnel retour en grâce pour le Fribourgeois, habitué à se débrouiller tout seul depuis plusieurs années, à l’écart de la fédération. Interview.

Auteur d’une saison exceptionnelle, Pascal Mancini va-t-il poursuivre sur sa lancée à Munich?Photo alain schafer

Propos  Recueillis Par As

Propos Recueillis Par As

11 août 2022 à 02:00

Beaucoup l’ont cru fini. L’intéressé lui-même a songé à jeter l’éponge pour se concentrer définitivement sur son rôle de coach. Aujourd’hui, le voilà à quelques jours de disputer les championnats d’Europe sur 100 m (15-21 août), pour la seconde fois de sa carrière après 2014. A 33 ans, Pascal Mancini n’avait jamais été aussi vite, en témoignent son titre de champion suisse et ses records battus coup sur coup cette saison. Il évoque sa résurrection et sa sélection avant son départ en train de Zurich, samedi, avec le gros de la délégation helvétique.

– Vous êtes sélectionné pour l’Euro à Munich. En début d’année, auriez-vous imaginé ou même rêvé d’un tel scénario?

– Non, pas du tout. J’aurais déjà été content d’y prendre part avec le relais. En début d’année, je ne pouvais même plus m’entraîner, faute d’argent. J’ai enchaîné les petits boulots et fait du coaching pour gagner ma croûte. En accompagnant mes athlètes lors d’un camp de préparation en Turquie à la mi-avril, j’ai constaté que ma forme était étonnamment bonne, malgré deux mois sans entraînement. Les longues pauses me réussissent bien apparemment (rires).

– La suite l’a confirmé. Vous n’aviez jamais couru aussi vite que cette saison. Votre secret?

– Difficile même pour moi de l’expliquer. Il y a quelques pistes. Le fait de coacher m’a permis d’acquérir de nouvelles méthodes, de nouveaux exercices, d’approfondir mes connaissances sur le sprint, d’améliorer ma technique, notamment en fin de course. Tout cela m’a rendu meilleur. Sans oublier une fraîcheur mentale et l’apport des «spikes carbone».

– Des quoi?

– Des chaussures à pointes avec une plaque carbone. Elles ne conviennent pas à tout le monde. Moi, j’ai senti directement la différence car j’ai les mollets assez gros. Elles m’aident à rester propre techniquement et à conserver de la vitesse entre 50 et 100 mètres. La première fois que je les ai testées, c’était au championnat suisse avec des chaussures empruntées, trop grandes, l’impression de courir avec des palmes (cela ne l’avait pas empêché de devenir champion). Mes records personnels ont été réalisés avec des baskets cette fois trop petites. J’ai enfin pu me procurer deux paires à la bonne taille, c’est dur de les trouver, avec lesquelles j’ai couru en Finlande.

– Est-ce la meilleure saison de votre carrière?

– Oui sans hésiter. Dans mes belles années, réaliser un chrono sous les 10’’30 était exceptionnel. Les enchaîner avec une telle régularité est totalement nouveau. Ma qualification ne tombe pourtant pas de nulle part. J’ai gagné toutes les courses auxquelles j’ai participé cette année en claquant à chaque fois de gros temps. Cette sélection, je l’ai méritée et j’en suis fier.

– Votre dernière participation, en individuel, à un grand championnat outdoor remonte à 2014. Abordez-vous celui-ci de manière différente?

– J’ai toujours abordé la compétition avec la même approche, on ne change pas qui on est. Ma confiance est toutefois plus élevée qu’en 2014 où je m’étais contenté de tirer mon épingle du jeu face à une concurrence très forte. L’écart de niveau avec les meilleurs s’est réduit, j’ai le sentiment d’avoir parfaitement ma place et de pouvoir faire mieux. Avoir décroché mon ticket au dernier moment me procure encore plus de sérénité.

– Après plusieurs années de galère, à vous débrouiller tout seul, loin des radars de la fédération, considérez-vous cette sélection comme une revanche?

– Non, je n’entre pas dans cette logique. Depuis 2018, je ne gagne plus rien avec l’athlétisme. Je cours avant tout pour le plaisir, par pure passion, sans aucune pression extérieure. A 33 ans, je suis ravi de découvrir de nouvelles choses et de courir encore plus vite.

– Comment avez-vous préparé cette échéance?

– Je me suis beaucoup entraîné ces derniers temps et j’éprouve un peu de fatigue. Je me suis forcé à prendre du repos cette semaine afin de récupérer et être prêt pour les séries qui se dérouleront lundi.

– Vos objectifs à Munich?

– Je pars toujours dans l’optique de gagner chaque course, peu importe l’adversité. Me fixer des limites ne m’a jamais réussi, même si je suis conscient que mes résultats dépendront aussi de la concurrence sur place. Cette qualification était inespérée. Maintenant que j’y suis, j’aimerais bien faire quelque chose de grand, en me persuadant qu’une finale est possible. Qui sait, peut-être que je vais encore me surprendre? Je suis persuadé que j’en ai encore sous le pied.

– Et avec le relais 4 x 100 m?

– Avec la blessure de Wicki, un Reais hors de forme, un Svensson incertain, difficile d’avoir des certitudes. L’essentiel est d’avoir retrouvé une dynamique et des gars motivés. J’aurai en plus la joie de courir avec Bradley Lestrade, un de mes athlètes, ça doit être historique. Quand je l’ai pris sous mon aile, il valait 11’’90 sur 100 m. La semaine prochaine, je vais lui passer le témoin au sein du relais national à l’Euro, un truc de fou!

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