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Sport

Le rêve américain dans un bassin

Un programme d’échange permet à Eléa Mehmetaj de passer une année académique dans un collège du Wisconsin aux Etats-Unis. Une expérience enrichissante et dépaysante pour la jeune nageuse de Murist qui s’est qualifiée pour la finale de l’Etat en novembre. Témoignage

Eléa accueillie chaleureusement par sa famille d’accueil aux Etats-Unis.

Alain  Schafer

Alain Schafer

12 janvier 2023 à 01:00

Etudier dans une High School américaine, une formule chargée de clichés, vérifiés ou exagérés, qui fleure bon l’aventure et le dépaysement pour tout étudiant européen. Une vie qu’Eléa Mehmetaj a la chance de mener depuis la rentrée automnale. «J’ai toujours souhaité aller aux Etats-Unis pour vivre mon rêve américain, pouvoir me débrouiller seule et apprendre l’anglais dans un pays où le sport est roi, le genre d’aventure qui fait grandir», confie la jeune Broyarde de 16 ans, atteinte par visioconférence à la veille des fêtes, alors que le blizzard faisait rage à l’extérieur; le charme d’habiter au Wisconsin, Etat situé dans la région des Grands Lacs et réputé pour son climat rigoureux. «Je confirme, il fait moins 40 dehors en ce moment!»

Rendez-vous en terre inconnue

Le Wisconsin n’est pas forcément la destination rêvée des étudiants étrangers quand on évoque le pays de l’Oncle Sam. «La Californie ou l’Arizona ont bien plus la cote, reconnaît-elle. Pour être honnête, j’ignorais tout de cet Etat avant d’y mettre les pieds», avoue Eléa qui a atterri à Plymouth, municipalité d’à peine 10 000 habitants. Un coin surtout connu pour deux équipes: les Green Bay Packers, franchise la plus titrée de la Ligue nationale de football américain (NFL), et les Milwaukee Bucks, champions NBA en 2021 (basketball). Moins reconnue, la natation que la collégienne pratique assidûment en Suisse, en parallèle à ses études au collège Saint-Michel à Fribourg. «Je n’avais aucune envie d’arrêter de nager une année et de perdre ainsi mon niveau.» La nageuse a joint l’utile à l’agréable et a trouvé une école correspondant à ses attentes. «L’avantage aux USA, c’est qu’il y a les infrastructures pour faire n’importe quel sport à l’école.»

Une réputation d’abord écornée. «Je craignais d’être larguée lors du premier entraînement», affirme la Fribourgeoise. Appréhension injustifiée. «Contrairement à mon club en Suisse où filles et garçons nagent ensemble, ici ils s’entraînent séparément. Je me suis retrouvée dans un groupe de 30 nageuses, dont certaines étaient des débutantes, entraînées par un seul coach. J’étais celle qui avait le meilleur niveau, et de loin. C’était une légère déception. J’ai vraiment eu peur de régresser et de voir mes chronos descendre en flèche.»

Les choses ont fini par tourner favorablement pour Eléa qui a rejoint le groupe masculin, le coach des garçons remarquant assez vite que la nouvelle venue sortait du lot. «L’éthique d’entraînement et le côté plus compétiteur chez les gars me correspondent beaucoup plus, ça me tire vers l’avant.»

Un bus en exclusivité

Changement fructueux. A la clé, une brillante qualification pour les finales de l’Etat à Waukesha en novembre sur ses deux distances de prédilection, les 100 et 200 yards (un yard: 0,91 m) libre. Seule qualifiée de l’école, Eléa a bénéficié d’un soutien spécial. «J’ai obtenu un jour de congé, un bus qui m’était réservé pour me rendre à la compétition. Les camarades m’ont souhaité bonne chance et j’ai reçu un t-shirt personnalisé avec le surnom «Swiss Miss» et les noms des coachs inscrits dessus, sympa!»

Le bilan a été plus contrasté sur le plan sportif. «Sur 200, ça s’est mal passé, je me suis mis trop de pression en oubliant de me faire plaisir. C’était mieux sur 100, avec une 9e place sur 16. Même si je suis restée en deçà de mes meilleurs temps, je m’en suis rapprochée», se félicite Eléa qui se souviendra surtout d’un épisode extrasportif. «Connaissant mal le règlement, je suis arrivée avec une combinaison affichant trop de logos publicitaires. Mes coachs se sont employés à les faire disparaître avec des feutres pour m’éviter une disqualification», rigole-t-elle.

Si les bassins lui étaient déjà familiers, le dépaysement a été total en dehors pour Eléa, soumise à de nouvelles habitudes, mentalités et règles. «Je suis quelqu’un d’hyperindépendante, vivant seule en semaine dans une chambre d’étudiante en Suisse. Ici, j’ai moins de libertés, il faut demander l’autorisation pour aller quelque part. Mais j’ai eu la chance de tomber dans une super famille d’accueil, avec des parents et quatre filles attachants, c’est comme si je faisais déjà partie de la famille», savoure la sportive, qui a grandi dans une fratrie de quatre enfants à Murist.

Tout sauf la brasse

Après des débuts comme bébé nageur, elle avait fait ses gammes sous la houlette de Marc Pury à Estavayer, avant de rejoindre le club de natation d’Yverdon en compagnie de sa grande sœur Lenisa, puis celui de Fribourg il y a 7 ans, après avoir goûté aussi à la gymnastique artistique et à la danse. «Dans l’eau, je suis plutôt polyvalente, à part la brasse que je préfère éviter!»

Eléa a décidé de prolonger son séjour jusqu’au 10 juillet, histoire de passer la fête nationale (4 juillet) avec sa famille d’accueil. Un autre événement à vivre en immersion. «Je serai de retour au pays trois jours avant les championnats suisses en grand bassin», sourit l’expatriée qui aimerait continuer à progresser sur la scène nationale, après avoir brillé au niveau régional, en témoigne sa qualification pour cinq finales au dernier championnat romand en juin 2022.

Un retour aux Etats-Unis pour étudier à l’université est-il envisageable? «Mon niveau en natation me permettrait sans doute de décrocher une bourse d’études, mais je ne suis pas sûre d’avoir envie de revenir ici pour 4 ans supplémentaires, j’ai encore trois ans de collège pour réfléchir», annonce celle qui se verrait bien dans le domaine de la psychologie. «Quoi qu’il en soit, cette expérience m’endurcit et me fait réaliser la chance de vivre dans un pays comme la Suisse.»

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