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Des verres à moitié pleins à déguster

Après une semaine de réouverture, les restaurateurs interrogés sont partagés entre optimisme et inquiétude. Les clients reviennent petit à petit, mais en raison des distanciations sociales et des pertes de places, il faut vraiment faire le plein des couverts restants.

Les restaurants jouent un rôle social important et les habitués deviennent comme des membres d’une même famille. Avec la réouverture, les patrons trinquent volontiers aux retrouvailles comme Pierrick Suter, de l’Hôtel de la Gare à Lucens.Photo ludmila glisovic

Ludmila  Glisovic

Ludmila Glisovic

22 mai 2020 à 02:00

La semaine dernière, à la veille de la réouverture des restaurants, nous avions pris la température dans quelques établissements de la région. Après une semaine, nous avons repris contact pour un premier bilan. Sourire aux lèvres et inquiétude au fond de la voix, les restaurateurs interrogés livrent leurs premières impressions.

«Certains clients nous ont appelés tous les jours pendant la fermeture, alors ceux qui sont venus pendant cette première semaine sont pour une grande majorité des habitués. Ils étaient vraiment contents de nous retrouver. Mais nous n'avons pas fait le plein», explique Benjamin Aebischer du Frogs & Roses à Estavayer-le-Lac. «Grâce aux rideaux de douche installés pour séparer les tables, la clientèle nous a dit se sentir à l’aise et en sécurité.»

L’ambiance au rendez-vous

Alexandre Skoric, patron de La Suite à Payerne, relève aussi la bonne ambiance qui règne. «Les rapports avec les clients sont plus fraternels qu’à l’accoutumée. Ils ne commandent plus leur café sur un ton indifférent», dit-il en imitant les intonations. «Je suis optimiste. J’ai une équipe de choc et je les remercie ainsi que tous les clients qui passent la porte».

Malgré tout, les débuts sont difficiles. «Mais les habitués reviennent. Et, comme nous sommes idéalement situés, nous avons aussi des gens de passage.»

Pierrick Suter, chef de l'Hôtel de la Gare à Lucens, affiche pour sa part le sourire des grands jours. Ouvert depuis vendredi 15 mai, il peut se vanter d’avoir fait le plein ce jour-là et le samedi suivant à tous les services. «Ça s’est vraiment bien passé. Nous avons bossé comme des fous. Les clients sont là pour nous soutenir et certains ont commandé des grands crus», remarque-t-il ravi.

Optimisme de rigueur

«Les réservations continuent d'arriver. Mon ressenti est à l’optimisme, malgré une situation très compliquée», note-t-il.

«Les gens sont heureux de revenir», souligne de son côté Stéphane Traeger qui tient avec sa femme, Jannick, le Restaurant des Lacustres et le Ripper Bar à Estavayer-le-Lac. «Au bar, ils sont un peu à la cool et on doit faire un peu la police. Mais ils comprennent la situation, alors ça se passe bien», se réjouit-il en soulignant que toutes les tranches d'âge sont présentes.

Dominique Voruz, du Chemin de Fer à Moudon, lui, ne masque pas son inquiétude. «Nous avons des clients à tous les services, les gens recommencent à venir boire leur café et nous accueillons à nouveau quelques marcheurs qui font le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle», note-t-il, tout en remarquant qu’il a le sentiment que les gens ne sortent plus vraiment. «Peut-être qu’après plusieurs semaines de chômage, certains n’ont plus assez d’argent», s’interroge-t-il. «Je ne suis pas désespéré, mais on ne peut pas continuer de bosser comme actuellement», prévient-il.

Il n’est pas le seul à appeler de ses vœux des changements.

Flexibilité nécessaire

Les restaurateurs font, sans exception, contre mauvaise fortune bon cœur. En effet, pour se conformer aux règles en vigueur, ils ont dû réduire leur capacité d’accueil et leurs horaires. Des coupes souvent drastiques et financièrement douloureuses.

Le Frogs & Roses n’ouvre plus à 7 h 45 le matin. Fini les habitués qui viennent lire les journaux et se réunir autour du «Papé», personnage incontournable du petit établissement. «Pour cette première semaine, nous avons fait 40 à 45% de chiffre d’affaires en moins. Nous sauvons les meubles. Si la fréquentation ne s’améliore pas nous changerons peut-être encore les jours et les horaires d’ouverture. Durant cette période, nous devons être flexibles», explique Benjamin Aebischer.

Avec des chambres d’hôtel, La Suite a peu modifié ses horaires et la situation est tendue. «Le résultat est mathématique, nous sommes en dessous de ce dont nous avons besoin», exprime Alexandre Skoric. «Malgré une augmentation de fréquentation, nos journées restent faites d’annulations et de reports de réservations.»

Pour se donner un coup de pouce, après s'être renseigné auprès de GastroSuisse, le restaurateur a décidé de remettre à disposition les journaux.

A l’instar d’autres établissements, La Suite souffre aussi de la disparition des réunions professionnelles, des assemblées, etc. qui représentent un revenu non négligeable. Ainsi, si l’Hôtel de la Gare tire son épingle du jeu, il déplore également la perte de trois à quatre banquets mensuels. «A la fin du mois, nous aurons probablement une baisse de 20 à 30% de notre chiffre», précise Pierrick Suter. Tous notent devoir faire appel aux RHT.

Le restaurant saisonnier des Lacustres remarque que pour s’en sortir, il a besoin de plus de places. «Peut-être que le Conseil fédéral va décider de réduire les espaces entre les tables?» espère-t-il. Et, à l’annonce de la diminution des contaminations du Covid-19, les tenanciers de rêver d’un déconfînement total et la fin de la peur.

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